Actualités - Parler de ressentis plutôt que d'évaluer

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Dans mes ateliers, je propose d'essayer de parler de nos ressentis plutôt que d'utiliser des évaluations comme "C'est trop beau ce que tu as chanté·e !".

Pourquoi ?

L'émerveillement est le propre de l'humain, écrit le philosophe Charles Pépin. J'ai lu son essai "Quand la beauté nous sauve" lors de ma formation d'un an à l'Institut de Recherche et de Formation en Art-Thérapie.

 «Nous avons besoin de la beauté pour nous sentir en paix avec nous-mêmes»
«Nous avons besoin de la beauté pour nous souvenir que nous pouvons aussi penser avec notre corps.»

Quand la beauté nous sauve, Charles Pépin, 2013

Quand nous percevons la beauté, toutes nos parts sont en accords. Le Beau éveille l'élan universel, l'envie de partage. D'où le fameux « C’est beau ! » qui sort spontanément quand on est touché·e par quelque chose.

Seulement, mine de rien, le "C'est beau" ouvre la possibilité du "C'est moche". Dans les ateliers que je facilite, nous ne sommes pas là pour faire du beau. Nous sommes là pour nous faire plaisir, pour oser, pour s'exprimer, pour lâcher-prise, pour se sentir en lien, sans fierté, ni honte.L'approche du Roy Hart me parle beaucoup.

Avec l'improvisation vocale, nous réunissons la voix, l'improvisation et la création, trois mondes qui convoquent de la vulnérabilité. Autant dire qu'on peut se sentir très fragile à s'exposer comme ça ! Et en même temps, je crois que c'est ce qui fait justement la force de cette pratique. Se sentir soutenu Chants pour tous·tese et accepté·e dans ce moment-là crée des liens forts. Je suis souvent surprise de me sentir si proche des personnes avec qui j'avais chanté Chants pour tous·tese alors que je ne connais même pas leurs noms et j'entends aussi régulièrement ce témoignage chez d'autres participant Chants pour tous·teses.

Ce qui sort de nous lors de l'improvisation vocale peut être trouvé Chants pour tous·tese beau, mais le plus important pour moi est le plaisir de cette expérience, notre ressenti personnel. Personnellement je suis autant touchée par l'esthétique musical que par le courage et le lâcher-prise en lien avec l'écoute de soi et des autres.

Plutôt que de qualifier un résultat, je peux donc parler de ce que j'ai vécu Chants pour tous·tese en disant par exemple « J’ai été touché Chants pour tous·tese », « Ça m’a ému Chants pour tous·tese », « J’ai eu des frissons », « Grâce à ton chant, j’ai voyagé », « Merci », « Je me sens nourri Chants pour tous·tese / rempli Chants pour tous·tese d'amour / détendu Chants pour tous·tese », ...

Parce qu'à vrai dire, je suis d'accord avec le poète Fernando Pessoa, je crois que le beau universel n'existe pas...

Parfois, en certains jours de lumière parfaite et exacte,
où les choses ont toute la réalité dont elles portent le pouvoir,
je me demande à moi-même tout doucement
pourquoi j’ai moi aussi la faiblesse d’attribuer
aux choses de la beauté.
De la beauté, une fleur par hasard en aurait-elle ?
Un fruit, aurait-il par hasard de la beauté ?
Non : ils ont couleur et forme
et existence tout simplement.
La beauté est le nom de quelque chose qui n’existe pas
et que je donne aux choses en fonction du plaisir qu’elles me donnent.
Cela ne signifie rien.
Pourquoi dis-je donc des choses : elles sont belles ?
Oui, même moi, qui ne vis que de vivre,
invisibles, viennent me rejoindre les mensonges des hommes
devant les choses,
devant les choses qui se contentent d’exister.
Qu’il est difficile d’être soi et de ne voir que le visible !

Le Gardeur de troupeau, Fernando Pessoa

En distinguant notre ressenti de nos pensées, nous développons ainsi notre capacité d'observation.
Selon Marshall Rosenberg, fondateur de la Communication NonViolente, plus nous arrivons à distinger une observation d'une évaluation, plus nous avons la capacité de communiquer d'une façon qui nous met profondément en lien avec l'autre.

 « Observer sans évaluer est la plus haute forme de l'intelligence humaine »

Jiddu Krishnamurti

En réalité, iel est extrêmement difficile de ne pas porter de jugement ! Nous en générons en flux continu car le cerveau adore catégoriser. L'idée n'est pas de nous rendre la vie impossible ;). Mais en mettant plus de conscience sur ce qui se passe en nous, nous pouvons mieux choisir ce que nous exprimons et partager par exemple nos expériences émotionnelles et corporelles personnelles plutôt que les pensées qu'elles ont générées.

En résumé

Pouvoir vivre un temps d'expression ensemble sans notion d'évaluation est pour moi un cadeau précieux que l’on se fait. C’est toute une communication à revoir et c’est loin d'être simple mais j'ai envie d'essayer !

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